Comment te dire adieu
Plus jamais je ne recevrais un message de toi. C’est dur et en même temps j’ai eu le temps de me préparer à cette idée, depuis ton message fin août où tu m’as annoncé ton cancer. Tu étais optimiste, tu allais te battre. Tu voulais venir me voir mais la douleur ne t’as pas vraiment donné le choix. La morphine t’as apporté un peu de répit. Heureusement j’ai pris de tes nouvelles et je suis venue te voir à l’hôpital, un jour où ta famille n’était pas là. Tu m’as serré fort dans tes bras quand je suis arrivée. Je t’ai offert une boîte de chocolats, tu étais bien, soulagé d’être à l’hôpital, de ne pas avoir mal. Tu m’as raconté ta descente aux enfers, cette fois où tu aurais pu y passer cet été et où le chirurgien t’as sauvé la vie lors d’une opération où tu as dû rester conscient. Tu m’as semblé fort, combatif, optimiste. On a rigolé lorsque je t’ai demandé si tu voulais que je te suces, malheureusement on venait de te poser une sonde. Oui, tu savais que la tumeur était inopérable, qu’elle finirai par t’emporter, mais tu voulais encore profiter des moments qu’il te restait à vivre, et moi j’avais envie de t’apporter des parenthèses de joie et de douceur. Je t’ai quitté en te serrant fort dans les bras, en te disant que maintenant que je connais le chemin je pourrais revenir te voir à l’hôpital.
Je n’en ai pas eu le temps, d’un message optimiste une semaine après ma visite, j’ai reçu ce dernier message de toi à la fin du mois. Un choc terrible, même si le mot « métastase » n’augure jamais rien de bon. Je m’en suis voulue de ne pas avoir pris le temps de revenir te voir à l’hôpital ou ailleurs. Je n’ai pas osé te demander de dire à ta famille de me prévenir s’il arrivait quoique ce soit. Après ce réflexe de te demander si je pouvais venir à l’hôpital te faire un dernier câlin, j’ai réalisé que tu ne pouvais ou ne voulais peut être pas vivre ça. Je n’avais peut être pas envie de le vivre non plus. Alors j’ai pris une grande inspiration et je t’ai écris mon dernier message, en ayant les larmes aux yeux. Je ne sais pas si tu l’as lu.
Rien ne pourra effacer ces beaux souvenirs que j’ai de toi. Notre premier rendez vous où tu étais tout timide en janvier 2013, à ces nuits passées à baiser encore et encore. Ta gourmandise, tes cunnis, ta longue queue qui me donnais des sensations intenses à la limite de la douleur, mais putain qu’est-ce que c’était bon. Nos discussions jusqu’à pas d’heure, les omelettes que tu m’as apprises à faire bien baveuses. Cette musique qui était continuellement chez toi. Merci de m’avoir fait découvrir Ibrahim Maalouf ou Deluxe, ils me feront avoir une pensée pour toi. Tu m’as fait goûter à ton herbe, tu m’as joué de la basse à poil, tu m’as fait découvrir ton univers, cette montagne que tu aimais et où tu étais reparti vivre. On a réalisé des fantasmes ensemble, des trios FFH et HHF, tu m’as fait vivre ma première double pénétration. C’est grâce à toi que j’ai découvert les cams. On a adoré baiser devant les autres par écran interposé. Je t’ai fait découvrir le plaisir anal avec un gode ceinture. Tu me surnommais ta petite fée du sexe. Tu m’as fait jouir avant mon insémination artificielle. Nous avons vécu beaucoup de choses pendant un an et demi et puis je suis devenue maman. Tu as été en couple. Nous nous sommes éloignés, mais nous avons toujours gardé contact, pris des nouvelles l’un de l’autre. On s’est revus en toute amitié, avant de se revoir pour baiser.
On a pris plaisir à se raconter tout ce qu’il s’est passé pendant ces années, on s’est revus quelques fois, même si tu étais à 1h de route. Et puis tu es reparti vivre à la montagne, et moi j’ai eu ma garçonnière. On s’est vus moins souvent, mais à chaque fois on passait 24h ensemble, voir plus…à discuter, boire ou baiser. J’étais heureuse de pouvoir te recevoir à mon tour dans mon petit chez moi, de coupler une soirée, une nuit et une journée de télétravail pour profiter pleinement de toi.
La dernière fois c’était en mai, avant que tu apprennes ta maladie, ça faisait 2 ans qu’on s’était pas vus et on a passé 2 nuits ensemble. Je suis heureuse d’avoir eu cette opportunité de passer ce temps avec toi.
Il y a deux jours j’ai cherché ton nom sur Internet, j’ai eu ce pressentiment que peut-être… Et effectivement je suis tombée sur ton avis de décès. Quelle douleur pour ta maman et ton frère. Nous avions parlé de ça à l’hôpital, tu culpabilisais de faire souffrir tes proches et finalement c’était un soulagement pour toi de ne pas laisser un enfant, même si tu aurais été heureux si tu avais pû connaître la paternité.
Tu n’avais que 45 ans et aujourd’hui c’était ton enterrement. C’est à 40mn de chez moi, pas très loin de la maison vide de ma maman. J’ai songé venir à l’église ou au cimetière pour te faire un dernier adieu. Être présente auprès de ta famille et tes amis pour qui j’aurai été une parfaite inconnue, mais j’ai des réunions professionnelles à 13h et à 15h, et je me suis dit que ce n’était peut être pas ma place, que ma présence pourrait susciter des interrogations ou un malaise. Alors j’ai fait un autre geste, j’ai planté un arbre pour toi via le site proposé et j’ai écrit quelques mots pour ta famille et pour toi, en laissant seulement mon prénom. S’ils veulent me contacter ils trouveront mon numéro dans ton portable avec une petite photo sexy mais heureusement soft.
Et puis c’est jour de télétravail, ce matin j’ai reçu un message d’un amant qui me demandais si j’étais disponible. J’ai répondu oui. Quand il a commencé à parcourir mon corps, je lui ai dit que tu étais mort et que je pourrais être en ce moment même à pleurer dans une église et un cimetière, mais que finalement c’était probablement mieux d’être là, nue dans un lit en train de lui sucer la queue avant qu’il ne profite de ma chatte.
Oui entre mes deux réunions, j’ai trouvé ma façon particulière de te rendre hommage, parce que baiser me permet de me sentir tellement vivante. Parce qu’il faut jouir de la vie.
Merci pour tous ces moments que j’ai eu la chance de vivre avec toi à travers ces 12 années.



